Le 23 janvier dernier, la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt invalidant la mesure « cash for car », en vigueur depuis le 1er janvier 2018 suite à une loi du 30 mars 2018. La Cour a ainsi confirmé le caractère discriminatoire soutenu par un certain nombre d’acteurs concernés.
Pour rappel, cette mesure laissait un choix aux travailleurs : ces derniers pouvaient en effet décider d’échanger leur voiture de société contre une « allocation de mobilité », à savoir un montant en cash bénéficiant des mêmes avantages sociaux et fiscaux (exonération fiscale et sociale) que ce qu’offrait l’usage privé d’une voiture de société. Dit autrement, ce montant permettait notamment au travailleur d’avoir un « net poche » plus important. Cette possibilité avait clairement été introduite dans un but précis : celui de diminuer l’utilisation de voitures de société pour les déplacements domicile-lieu de travail, en poursuivant ainsi un objectif de développement durable sur le plan environnemental en diminuant la pression automobile, volonté louable compte tenu de l’ensemble des discussions climatiques et environnementales qui animent les débats actuellement.
Certains avaient toutefois rapidement pointé du doigt le caractère discriminatoire de cette mesure, celle-ci créant des différentes de traitement non justifiées entre les travailleurs. La Cour constitutionnelle fut dès lors saisie afin de trancher cette question.
Par un arrêt du 23 janvier 2020, la Cour constitutionnelle a décidé que cette mesure violait effectivement les principes constitutionnels d’égalité et de non-discrimination.
Tout d’abord, la Cour précise que cette mesure crée une discrimination non justifiée entre deux catégories de travailleurs : (i) ceux qui ne bénéficient pas de l’allocation en question et qui ont donc un salaire intégralement soumis aux contributions fiscales et sociales et (ii) ceux touchant cette indemnité et pour lesquels il n’était pas demandé d’investir cet argent dans un autre moyen de transport. Ces derniers percevaient donc in fine une sorte de « partie de salaire supplémentaire » bénéficiant d’avantages fiscaux et sociaux.
Ensuite, la Cour a estimé que la mesure n’était pas pertinente pour atteindre l’objectif qui était poursuivi : l’octroi de l’allocation de mobilité n’était pas subordonné à la garantie que le bénéficiaire du montant n’utilise plus de voiture pour ses déplacements domicile-lieu de travail. Or, le but était effectivement un objectif environnemental. Si le travailleur ne doit pas choisir une autre alternative que la voiture, l’objectif n’est clairement pas atteint.
La Cour a donc logiquement annulé cette mesure, en décidant toutefois de maintenir les effets de celle-ci dans l’attente de nouvelles mesures remplaçant celle-ci et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2020 inclus. Pour l’anecdote, cette décision est assez surprenante étant donné que depuis le 1er mars 2019, il existe ce qu’on nomme le « budget de mobilité », qui permet au travailleur d’investir un montant dans des moyens de transport autres que la voiture…
Une nouvelle fois, cette décision de la Cour atteste des errances du gouvernement dans l’introduction trop rapide de mesures trop peu réfléchies. Et que dire de la décision d’annuler avec maintien d’effets (ce qui n’est pas sans rappeler la décision relative à la taxe sur les comptes-titres). Une nouvelle fois, la sécurité juridique est mise à mal. Espérons que ces multiples échecs législatifs finissent par pousser à la préparation plus minutieuse de mesures destinées à perdurer.